
- Date de publication 26.03.2025
- theme Film 3D de la semaine
- Formation Cinéma d’Animation 3D et Effets Spéciaux
Le court-métrage d’animation “No Bird’s Land”, réalisé par Léa Clastres, Thomas Coppée, Romain Ferrandez, Emélie Garcia, Coline Laclau-Pussacq, Louise Massardi, Romain Mosser, Quitterie Ortuno et Chloé Raynal (étudiants de la promotion 2023 de l’ESMA Toulouse) suit le parcours de trois soldats plongés en plein cœur de la Première Guerre mondiale, à l’issue d’un assaut dévastateur dans les tranchées. Entre peur, courage, fraternité et résignation, ce projet ambitieux a su relever de nombreux défis artistiques et techniques.

Redonner de la lumière aux Poilus
Dans No Bird’s Land, le spectateur est immédiatement propulsé dans l’enfer des tranchées. Le film s’ouvre sur une scène de bombardements et de chaos, plongeant d’emblée dans une atmosphère oppressante. Grâce à un travail minutieux sur l’image – alternant flous, contrastes marqués et mouvements frénétiques – une impression de rêve, ou plus franchement de cauchemar, se dégage dès les premières secondes. Enfin, apparaissent les trois personnages principaux : Edgard, un première classe blessé, Jean, un soldat du 3e régiment d’infanterie qui va tenter tant bien que mal de trouver un médecin au milieu de ce carnage, et un dernier soldat, anonyme, en état de sidération totale.

Un défi technique audacieux
L’un des choix les plus marquants du film réside dans la représentation des soldats sous la forme de pigeons à morphologie humaine. Si ce parti pris a été immédiatement assumé par les réalisateurs, c’est bien dans l’optique d’illustrer symboliquement le mépris avec lequel les soldats étaient envoyés au front, considérés comme de la simple chair à canon.

Conférant au film une esthétique singulière et une originalité frappante, ce choix a requis un travail de modélisation particulièrement exigeant, notamment pour assurer une crédibilité et un naturel saisissants aussi bien aux plumes des personnages qu’à leurs bras :

“Lorsque nous avons conçu les personnages, notre intention était de conserver certaines caractéristiques propres aux oiseaux, telles que le bec et les pattes”, expliquent les réalisateurs.
“La modélisation des plumes a été un enjeu majeur dès le début de la production. Nous savions qu’il n’y en aurait que sur la tête et les mains, mais nous avons dû expérimenter de nombreuses techniques avant d’aboutir à un résultat convaincant.”
Le choix de rendre les oiseaux inaptes au vol renforce la métaphore tragique : ces soldats-pigeons sont cloués au sol, condamnés à leur sort sans le moindre espoir d’évasion.

Transmettre l’émotion à travers l’animation
Un autre défi majeur du film a été de transmettre des émotions humaines à ces personnages animaliers, une représentation aussi rare qu’ambitieuse. Pour y parvenir, l’équipe a mis l’accent sur leurs expressions faciales, en dotant les pigeons d’yeux humains, accentuant ainsi l’empathie du spectateur face à leur destin tragique. Le lighting joue également un rôle essentiel, sculptant l’image et renforçant l’immersion dans cet univers sombre et tourmenté.

Chaque plan a fait l’objet d’un soin particulier, avec un travail approfondi sur les shaders et les textures peintes, conférant au film un réalisme troublant et une atmosphère visuelle unique. On ressent au visionnage un travail de recherche extrêmement fouillé, témoignant d’une volonté de retranscrire fidèlement l’horreur des tranchées, tout en y apportant une dimension symbolique forte.

Entre prouesse technique et engagement narratif, No Bird’s Land réussit le pari de livrer une vision poignante et originale de la Grande Guerre, portée par une direction artistique audacieuse et un sens du détail impressionnant. Un grand bravo à l’ensemble des étudiants ayant collaboré sur ce projet !
